Citations sur ratione

Une collection de citations sur le thème de ratione, pluie, tout, bien-être.

Citations sur ratione

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“262. Assise sur le stoep aux côtés de mon père, je regarde la terre tourner, les oiseaux s’occuper à nouveau de bâtir leurs nids; la brise est fraîche sur mes joues, et peut-être aussi sur les siennes. «Tu te souviens», dis-je, «quand on allait à la mer, autrefois? On remplissait un panier de sandwiches et de fruits, on allait en carriole à la gare et on prenait le train du soir? On dormait dans le train, bercés par la chanson des roues, on s'éveillait à peine, tout somnolents, quand le train s'arrêtait pour prendre de l'eau, on entendait le murmure lointain des cheminots, et on se rendormait; le lendemain, on arrivait à la mer, on allait à la plage, et on retirait nos chaussures pour patauger, tu me tenais par la main et tu me soulevais au-dessus des vagues? Tu te souviens, le bernard-l'hermite qui m'a pincé l'orteil, et j'ai pleuré, pleuré, et tu me faisais des grimaces pour me consoler? (Tu te souviens de la pension où on logeait? Cette nourriture insipide - un soir, tu as repoussé ton assiette et déclaré que tu ne mangerais pas d'immondices, tu t'es levé et tu as quitté la salle à manger, et j'ai repoussé mon assiette et je t'ai suivi. Et tu te rappelles comme les chiens étaient contents de nous revoir? Une fois, le vieux Jakob avait oublié de les nourrir, et tu as juré épouvantablement et tu lui as supprimé sa ration de viande pour une semaine.. Tu te rappelles Jakob, et Hendrik, et Ou-Anna et Klein-Anna? Tu te rappelles ce fils de Ou-Anna qui avait été tué dans un accident et qu'on avait ramené à la ferme pour l'enterrer, et Ou-Anna qui voulait se jeter dans la fosse?»”

J. M. Coetzee (1940) romancier et professeur en littérature sud-africain

Au cœur de ce pays , 1976

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“Croire au progrès technique sur fond de conviction scientiste, dès le dernier tiers du [XIX], c'était croire au progrès de l'espèce humaine. C'était plus précisément croire que le progrès technique allait assurer le plus grand progrès possible de l'humanité vers la liberté et le bonheur. Il faut en effet tenir compte d'un clivage dans le champs des fins du progrès explicitement conceptualisées par les penseurs progressistes : d'une part, les finalités de l'ordre de la liberté, de la libération ou de l'émancipation (dont la condition nécessaire est le progrès du savoir); d'autre part, les finalités d'un tout autre ordre, résumable par le mot « bonheur », dont les conditions de possibilité (sécurité dans la paix et pleine satisfaction des besoins, d'où bien-être, plaisir, etc.) sont imaginées comme des effets de la maîtrise rationnelle ou théorico-pratique (par la science et la technique) de la nature (d'où l'éloge saint-simonien de l'exploitation sans limite de la terre), mais aussi de la société, d'où le souci commun à Saint-Simon, à Comte, à Renan et à Marx, de l'organisation et de la réorganisation de l'ordre social. L'humanité cesse d'être conçue « à l'image de Dieu », elle devient Dieu lui-même, elle s'y substitue en un sens, pour devenir le sujet de l'histoire universelle, dont le « progrès » est le moteur.”

Pierre-André Taguieff (1946) philosophe et politologue français

Essais, Les Contre-réactionnaires, 2007

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“Le monde d’aujourd’hui est un chaos d’opinions et d’aspirations désordonnées : le soi-disant « monde libre » est un chaos fluide; la partie totalitaire du monde moderne est un chaos rigide. Par opposition, le monde ancien constituait toujours un ordre, c’est-à-dire une hiérarchie de concepts, chacun au niveau qui lui est propre. Le chaos a été provoqué, nous l’avons vu, par le « télescopage » humaniste de la hiérarchie jusqu’au niveau psychique, et par l’intrusion, dans les considérations terrestres, d’aspirations vers l’autre monde, frustrées et perverties.

L’homme, en raison de sa véritable nature, ne peut pas ne pas adorer; si sa perspective est coupée du plan spirituel, il trouvera un « dieu » à adorer à un niveau inférieur, dotant ainsi quelque chose de relatif ce qui seul appartient à l’Absolu. D’où l’existence aujourd’hui de tant de « mots tout-puissants » comme « liberté », « égalité », « instruction », « science », « civilisation », mots qu’il suffit de prononcer pour qu’une multitude d’âmes se prosterne en une adoration infra-rationnelle.

Les superstitions de la liberté et de l’égalité ne sont pas seulement le résultat mais aussi, en partie, la cause du désordre général, car chacune, à sa manière, est une révolte contre la hiérarchie; et elles sont d’autant plus pernicieuses qu’elles sont des perversions de deux des élans les plus élevés de l’homme. Corruptio optimi pessima, la corruption du meilleur est la pire; mais il suffit de rétablir l’ordre ancien, et les deux idoles en question s’évanouiront de ce monde (laissant ainsi la place aux aspirations terrestres légitimes vers la liberté et l’égalité) et, transformées, reprendront leur place au sommet même de la hiérarchie.

Le désir de liberté est avant tout désir de Dieu, la Liberté Absolue étant un aspect essentiel de la Divinité. Ainsi, dans l’Hindouisme, l’état spirituel suprême qui marque la fin de la voie mystique est désigné par le terme de délivrance (moksha), car c’est un état d’union (yoga) avec l’Absolu, l’Infini et l’Éternel, qui permet l’affranchissement des liens de la relativité. C’est évidemment, avant tout, cet affranchissement auquel le Christ faisait référence lorsqu’il disait : « Recherchez la connaissance, car la connaissance vous rendra libre », étant donné que la connaissance directe, la Gnose, signifie l’union avec l’objet de la connaissance, c’est-à-dire avec Dieu. (pp. 59-60)”

Martin Lings (1909–2005) savant anglais du soufisme

Ancient Beliefs and Modern Superstitions

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“Et, assurément, la réalité est plus sombre encore que n'osait la prévoir le savant [F. Schrader] qui formulait en 1911 ces conclusions, dont les technocrates et les promoteurs de l'époque ont dû sourire. Il ne pouvait imaginer ni les pluies acides, ni la pollution des rivières et des mers par le mercure et les autres déchets de l'industrie chimique et atomique, ou par l'élévation artificielle de la température de l'eau due aux usines riveraines. Il n'avait pas prévu que plus de deux mille espèces animales seraient exterminées avant la fin du siècle; il ne savait encore rien de l'usage des herbicides, ni des sournois dépotoirs atomiques, cachés dans des endroits écartés, quand ce n'est pas aux abords des villes, ou transportés secrètement à prix d'or pour continuer leur cycle millénaire de nuisance dans le sous-sol des continents pauvres. Il n'eût même pas été capable d'imaginer le désastre de nos marées noires, fruit de l'incurie et de l'avidité, car une construction plus solide et plus rationnelle des pétroliers obligerait à en éliminer la plupart. Il ne pouvait pas prévoir non plus la destruction de la stratosphère, la raréfaction de l'oxygène et de l'ozone, la calotte thermique obscurcissant la lumière solaire et élevant artificiellement la température au ras du sol.
On voit du moins qu'il en savait assez pour signaler le chemin pris par nos apprentis sorciers et par nos marchands du Temple, qui de nos jours n'encombrent plus seulement les abords des sanctuaires mais la terre entière. Ce qu'il disait, avec quelques autres (Albert Schweitzer, un peu plus tard, en Afrique, était alerté lui aussi par les trop soudains changements de climat), nous le crions aujourd'hui. (p. 275)”

Marguerite Yourcenar (1903–1987) écrivaine française

Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey

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