Citations sur naïf

Une collection de citations sur le thème de naïf, tout, seul, bien-être.

Citations sur naïf

Charles-Augustin Sainte-Beuve photo
Bret Easton Ellis photo
James George Frazer photo
Joseph Joubert photo

“Dans le style de Bossuet, la franchise et la bonhomie gauloises se font sentir avec grandeur. Il est pompeux et sublime, populaire et presque naïf.”

Joseph Joubert (1754–1824) philosophe et essayiste français

Tome 2, Jugements littéraires, Écrivains religieux

Georges Darien photo

“Le patriotisme n’est pas seulement le dernier refuge des coquins; c’est aussi le premier piédestal des naïfs et le reposoir favori des imbéciles. Je ne parle pas du patriotisme tel qu’il devrait être, ou tel qu’il pourrait être, mais du patriotisme que nous voyons en France et même partout, qui se manifeste dans toute son hypocrisie, toute son horreur et toute sa sottise depuis trente ans. Et je dis que la constatation ci-dessus, dont on peut facilement, tous les jours, vérifier l’exactitude, fait comprendre comment se recrutent les états-majors et les troupes qui constituent les régions du chauvinisme. Des naïfs et des imbéciles, je n’ai pas grand-chose à dire; les premiers, dupes d’enthousiasmes irréfléchis et d’illusions juvéniles, arrivent souvent à se rendre compte du caractère réel de la doctrine cocardière et sortent, écœurés, de la chapelle où on la prêche; les seconds, misérables êtres aux cerveaux boueux, forment un immense troupeau de serfs à la disposition d’un maître à forte poigne — ou à fort gosier — et portent leur patriotisme comme les crétins portent leur goitre. Quant aux chefs, ce sont quelquefois des républicains, quelquefois des monarchistes, quelquefois les deux ensemble, ou bien ni l’un ni l’autre, Ce sont toujours des coquins. Le patriotisme n’est pour eux qu’une enseigne qui doit attirer la foule; un décor derrière lequel ils pourront machiner à loisir les combinaisons de leur goût.”

Georges Darien (1862–1921) romancier, auteur dramatique et pamphlétaire français, collaborateur de périodiques anarchistes

La Belle France (1901)

Jean-Luc Addor photo
Henry de Monfreid photo
Félicité Robert de Lamennais photo
Paul Klee photo
Étienne de La Boétie photo
Marc-Édouard Nabe photo
Léon Trotsky photo
Charles-Augustin Sainte-Beuve photo
Oxmo Puccino photo
Amélie Nothomb photo
Frithjof Schuon photo

“Il faudrait pouvoir restituer au mot « philosophie » sa signification originelle : la philosophie — l'« amour de la sagesse » — est la science de tous les principes fondamentaux; cette science opère avec l'intuition, qui « perçoit », et non avec la seule raison, qui « conclut ». Subjectivement parlant, l'essence de la philosophie est la certitude; pour les modernes au contraire, l'essence de la philosophie est le doute : le philosophe est censé raisonner sans aucune prémisse (voraussetzungsloses Denken), comme si cette condition n'était pas elle-même une idée préconçue; c'est la contradiction classique de tout relativisme. On doute de tout, sauf du doute(1).

La solution du problème de la connaissance — si problème il y a — ne saurait être ce suicide intellectuel qu'est la promotion du doute; c'est au contraire le recours à une source de certitude qui transcende le mécanisme mental, et cette source — la seule qui soit — est le pur Intellect, ou l'Intelligence en soi. Le soi-disant « siècle des lumières » n'en soupçonnait pas l'existence; tout ce que l'Intellect pouvait offrir — de Pythagore jusqu'aux scolastiques — n'était pour les encyclopédistes que dogmatisme naïf, voire « obscurantisme ». Fort paradoxalement, le culte de la raison a fini dans cet infra-rationalisme — ou dans cet « ésotérisme de la sottise » — qu'est l'existentialisme sous toutes ses formes; c'est remplacer illusoirement l'intelligence par de l'« existence ».

D'aucuns ont cru pouvoir remplacer la prémisse de la pensée par cet élément arbitraire, empirique et tout subjectif qu'est la « personnalité » du penseur, ce qui est la destruction même de la notion de vérité; autant renoncer à toute philosophie. Plus la pensée veut être « concrète », et plus elle est perverse; cela a commencé avec l'empirisme, premier pas vers le démantèlement de l'esprit; on cherche l'originalité, et périsse la vérité(2).
(…)
!
Somme toute, la philosophie moderne est la codification d'une infirmité acquise; l'atrophie intellectuelle de l'homme marqué par la « chute » avait pour conséquence une hypertrophie de l'intelligence pratique, d'où en fin de compte l'explosion des sciences physiques et l'apparition de pseudo-sciences telles que la psychologie et la sociologie.”

The Transfiguration of Man

Charles Baudelaire photo
Guy Delisle photo
Aimé Césaire photo
Frithjof Schuon photo
Frithjof Schuon photo
Frithjof Schuon photo
Frithjof Schuon photo
Arthur Rimbaud photo
Émile Zola photo
Emmanuel Carrère photo

“Dans son rapport inaugural, le Forum, à propos de la mondialisation qu'il a symbolisée sous ses formes les plus conquérantes et sûres d'elles-mêmes, évoque avec un sens exquis de l'euphémisme "un risque de désillusion". Mais dans les conversations, c'est autre chose. Désillusion? Crise? Inégalités? D'accord, si vous y tenez, mais enfin, comme nous le dit le très cordial et chaleureux PDG de la banque américaine Western Union, soyons clairs : si on ne paie pas les leaders comme ils le méritent, ils s'en iront voir ailleurs. Et puis, capitalisme, ça veut dire quoi? Si vous avez 100 dollars d'économies et que vous les mettez à la banque en espérant en avoir bientôt 105, vous êtes un capitaliste, ni plus ni moins que moi. Et plus ces capitalistes comme vous et moi (il a réellement dit "comme vous et moi", et même si nous gagnons fort décemment notre vie, même si nous ne connaissons pas le salaire exact du PDG de la Western Union, pour ne rien dire de ses stock-options, ce "comme vous et moi" mérite à notre sens le pompon de la "brève de comptoir" version Davos), plus ces capitalistes comme vous et moi, donc, gagneront d'argent, plus ils en auront à donner, pardon à redistribuer, aux pauvres. L'idée ne semble pas effleurer cet homme enthousiaste, et à sa façon, généreux, que ce ne serait pas plus mal si les pauvres étaient en mesure d'en gagner eux-mêms et ne dépendaient pas des bonnes dispositions des riches. Faire le maximum d'argent, et ensuite le maximum de bien, ou pour les plus sophistiqués faire le maximum de bien en faisant le maximum d'argent, c'est le mantra du Forum, où on n'est pas grand-chose si on n'a pas sa fondation caritative, et c'est mieux que rien, sans doute "(vous voudriez quoi? Le communisme?"). Ce qui est moins bien que rien, en revanche, beaucoup moins bien, c'est l'effarante langue de bois dans laquelle ce mantra se décline. Ces mots dont tout le monde se gargarise : préoccupation sociétale, dimension humaine, conscience globale, changement de paradigme… De même que l'imagerie marxiste se représentait autrefois les capitalistes ventrus, en chapeau haut de forme et suçant avec volupté le sang du prolétariat, on a tendance à se représenter les super-riches et super-puissants réunis à Davos comme des cyniques, à l'image de ces traders de Chicago qui, en réponse à Occupy Wall Street, ont déployé au dernier étage de leur tour une banderole proclamant : "Nous sommes les 1%". Mais ces petits cyniques-là étaient des naïfs, alors que les grands fauves qu'on côtoie à Davos ne semblent, eux, pas cyniques du tout. Ils semblent sincèrement convaincus des bienfaits qu'ils apportent au monde, sincèrement convaincus que leur ingénierie financière et philanthropique (à les entendre, c'est pareil) est la seule façon de négocier en douceur le fameux changement de paradigme qui est l'autre nom de l'entrée dans l'âge d'or. Ça nous a étonnés dès le premier jour, le parfum de new age qui baigne ce jamboree de mâles dominants en costumes gris. Au second, il devient entêtant, et au troisième on n'en peut plus, on suffoque dans ce nuage de discours et de slogans tout droit sortis de manuels de développement personnel et de positive thinking. Alors, bien sûr, on n'avait pas besoin de venir jusqu'ici pour se douter que l'optimisme est d'une pratique plus aisée aux heureux du monde qu'à ses gueux, mais son inflation, sa déconnexion de toute expérience ordinaire sont ici tels que l'observateur le plus modéré se retrouve à osciller entre, sur le versant idéaliste, une indignation révolutionnaire, et, sur le versant misanthrope, le sarcasme le plus noir. (p. 439-441)”

Emmanuel Carrère (1957) écrivain, scénariste et réalisateur français

Il est avantageux d'avoir où aller

Nicolas Machiavel photo
Gustave Flaubert photo

“Les deux femmes, vêtues de noir, remirent le corps dans le lit de ma sœur, elles jetèrent dessus des fleurs et de l’eau bénite, puis, lorsque le soleil eut fini de jeter dans l’appartement sa lueur rougeâtre et terne comme le regard d’un cadavre, quand le jour eut disparu de dessus les vitres, elles allumèrent deux petites bougies qui étaient sur la table de nuit, s’agenouillèrent et me dirent de prier comme elles.

Je priai, oh! bien fort, le plus qu’il m’était possible! mais rien… Lélia ne remuait pas!
Je fus longtemps ainsi agenouillé, la tête sur les draps du lit froids et humides, je pleurais, mais bas et sans angoisses; il me semblait qu’en pensant, en pleurant, en me déchirant l’âme avec des prières et des vœux, j’obtiendrais un souffle, un regard, un geste de ce corps aux formes indécises et dont on ne distinguait rien si ce n’est, à une place, une forme ronde qui devait être La tête, et plus bas une autre qui semblait être les pieds. Je croyais, moi, pauvre naïf enfant, je croyais que la prière pouvait rendre la vie à un cadavre, tant j’avais de foi et de candeur!

Oh! on ne sait ce qu’a d’amer et de sombre une nuit ainsi passée à prier sur un cadavre, à pleurer, à vouloir faire renaître le néant! On ne sait tout ce qu’il y a de hideux et d’horrible dans une nuit de larmes et de sanglots, à la lueur de deux cierges mortuaires, entouré de deux femmes aux chants monotones, aux larmes vénales, aux grotesques psalmodies! On ne sait enfin tout ce que cette scène de désespoir et de deuil vous remplit le cœur : enfant, de tristesse et d’amertume; jeune homme, de scepticisme; vieillard, de désespoir!

Le jour arriva.
Mais quand le jour commença à paraître, lorsque les deux cierges mortuaires commençaient à mourir aussi, alors ces deux femmes partirent et me laissèrent seul. Je courus après elles, et me traînant à leurs pieds, m’attachant à leurs vêtements :
— Ma sœur! leur dis-je, eh bien, ma sœur! oui, Lélia! où est-elle?
Elles me regardèrent étonnées.
— Ma sœur! vous m’avez dit de prier, j’ai prié pour qu’elle revienne, vous m’avez trompé!
— Mais c’était pour son âme!
Son âme? Qu’est-ce que cela signifiait? On m’avait souvent parlé de Dieu, jamais de l’âme.
Dieu, je comprenais cela au moins, car si l’on m’eût demandé ce qu’il était, eh bien, j’aurais pris La linotte de Lélia, et, lui brisant la tête entre mes mains, j’aurais dit : « Et moi aussi, je suis Dieu! » Mais l’âme? l’âme? qu’est-ce cela?
J’eus la hardiesse de le leur demander, mais elles s’en allèrent sans me répondre.

Son âme! eh bien, elles m’ont trompé, ces femmes. Pour moi, ce que je voulais, c’était Lélia, Lélia qui jouait avec moi sur le gazon, dans les bois, qui se couchait sur la mousse, qui cueillait des fleurs et puis qui les jetait au vent; c’était Lelia, ma belle petite sœur aux grands yeux bleus, Lélia qui m’embrassait le soir après sa poupée, après son mouton chéri, après sa linotte. Pauvre sœur! c’était toi que je demandais à grands cris, en pleurant, et ces gens barbares et inhumains me répondaient : « Non, tu ne la reverras pas, tu as prié non pour elle, mais tu as prié pour son âme! quelque chose d’inconnu, de vague comme un mot d’une langue étrangère; tu as prié pour un souffle, pour un mot, pour le néant, pour son âme enfin! »

Son âme, son âme, je la méprise, son âme, je la regrette, je n’y pense plus. Qu’est-ce que ça me fait à moi, son âme? savez-vous ce que c’est que son âme? Mais c’est son corps que je veux! c’est son regard, sa vie, c’est elle enfin! et vous ne m’avez rien rendu de tout cela.
Ces femmes m’ont trompé, eh bien, je les ai maudites.

Cette malédiction est retombée sur moi, philosophe imbécile qui ne sais pas comprendre un mot sans L’épeler, croire à une âme sans la sentir, et craindre un Dieu dont, semblable au Prométhée d’Eschyle, je brave les coups et que je méprise trop pour blasphémer.”

Gustave Flaubert (1821–1880) romancier et auteur dramatique français

La dernière heure : Conte philosophique inachevé

Arthur Rimbaud photo
Frithjof Schuon photo

“Peut-être vaut-il la peine de rendre compte ici du phénomène ambigu de la naïveté : celle-ci est avant tout du manque d'expérience combiné avec de la crédulité, comme le prouve l'exemple des enfants, même les plus intelligents. La crédulité peut avoir un fond positif: elle peut être l'attitude de l'homme véridique qui croit tout naturellement que tout le monde est comme lui; il y a des peuplades qui sont crédules parce qu'elles ignorent le mensonge. Il va donc de soi que la naïveté peut être chose toute relative : un homme qui ne connaît pas la psychologie des fous est un naïf aux yeux des psychiatres, même s'il est fort loin d'être un sot. S'il faut être « prudents comme les serpents » — à condition d'être « simples comme les colombes (7) » — c'est avant tout parce que l'ambiance dresse des embûches et qu'il faut savoir se défendre, c'est-à-dire que notre imagination doit avoir conscience des caprices de la mâyâ terrestre.

(7) Ce qui du reste fait penser aux « pauvres dans l'esprit », qui ne sont certes pas censés manquer de facultés mentales. On connaît cette histoire : les novices condisciples du jeune Thomas d'Aquin, connaissant sa crédulité - réelle ou apparente - l'appelèrent un jour pour lui montrer « un boeuf qui vole », puis se moquèrent de lui parce qu'il courut à la fenêtre pour voir le phénomène; il leur répondit : « Un boeuf qui vole est chose moins extraordinaire qu'un moine qui ment.”

Frithjof Schuon (1907–1998) métaphysicien, théologien et philosophe suisse

Roots of the Human Condition

Alejo Carpentier photo

“Attention! Ce sont les croyants béats comme vous, les naïfs, les dévoreurs d'écrits humanitaires, les calvinistes de l'idée, qui élèvent les guillotines.”

Alejo Carpentier (1904–1980) écrivain, romancier, essayiste, musicologue cubain

El siglo de las luces

Frithjof Schuon photo
Honoré de Balzac photo

“Le propre d’un grand homme est de dérouter les calculs ordinaires. Il est sublime et attendrissant, naïf et gigantesque.”

Honoré de Balzac (1799–1850) romancier, critique littéraire, essayiste, journaliste et écrivain français

Letters of Two Brides (1841-1842)

Anatole France photo

“Il est bon que le cœur soit naïf et que l’esprit ne le soit pas.”

Anatole France (1844–1924) écrivain, biographe, journaliste et critique littéraire français

The Literary Life (1888-1892)