Citations sur cycle

Une collection de citations sur le thème de cycle, fait, tout, pluie.

Citations sur cycle

“Le ton de votre préambule (« fusion du réel et de l'imaginaire » comme la fusion des âmes et des corps) m'a fait rouvrir les manuels classiques d'érotologie hindous. J'ai trouvé que l'Ananga Ranga rompait d'un certain point de vue le silence fait sur les représentations mentales des amoureux en mettant la jouissance de la femme en rapport avec le cycle lunaire. Nul doute que chez les Orientaux pour qui il n'y a pas antagonisme entre l'esprit et la chair, leurs postures physiques s'associent au monde objectif dans un dessein profond. Le corps de la femme est lui-même une représentation du monde où les astres viennent conjuguer leurs influences suivant l'envahissement de l'ombre, comme ils rythment les mouvements océaniques. Tout ce qui vient au cœur des amants alors que s'éveillant enfin à l'aimée, rien d'assez pur ne saurait dessiner un lieu où naître, se résout dans cette énigme dramatique : à la fois ils sont au monde et ils ne sont pas au monde. Ils ont basculé d'un côté où « l'étreinte de chair, tant qu'elle dure, défend toute échappée sur la misère du monde.»”

Robert Guyon (1941)

Ce qui les entoure porte leurs noms.
Il est ici question d'une enquête initiée par la revue surréaliste La Brèche en décembre 1964 engageant le thème des représentations érotiques (Robert Guyon cite succintement André Breton). [Premières réponses à l'enquête sur les représentations érotiques, Robert Guyon, La Brèche, 8, Novembre 1965, 105]
Réponses à l'enquête sur les représentations érotiques, 1965

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“À cette heure, édifié par les subtils génies du Feu, un temple nouveau s’élevait là même où, dans le crépuscule, on avait cru voir un neptunien palais d’argent dont l’architecture imitait les torsions des conques marines. C’était, agrandi, un de ces labyrinthes construits sur le fer des landiers, demeures aux cent portes habitées par les présages ambigus; un de ces fragiles châteaux vermeils aux mille fenêtres, où se montrent un moment les princesses salamandres qui rient voluptueusement au poète charmé. Rose comme une lune naissante rayonnait sur la triple loggia la sphère de la Fortune, supportée par les épaules des Atlantes; et ses reflets engendraient un cycle de satellites. Du quai des Esclavons, de la Giudecca, de San Giorgio, avec un crépitement continu, des faisceaux de tiges enflammées convergeaient au zénith et s’y épanouissaient en roses, en lis, en palmes, formant un jardin aérien qui se détruisait et se renouvelait sans cesse par des floraisons de plus en plus riches et étranges. C’était une rapide succession de printemps et d’automnes à travers l’empyrée. Une immense pluie scintillante de pétales et de feuillages tombait des dissolutions célestes et enveloppait toutes choses d’un tremblement d’or. Au loin, vers la lagune, par les déchirures ouvertes dans cet or mobile, on voyait s’avancer une flotte pavoisée : une escadre de galères semblables peut-être à celles qui naviguent dans le rêve du luxurieux dormant son dernier sommeil sur un lit imprégné de parfums mortels. Comme celles-là peut-être, elles avaient des cordages composés avec les chevelures tordues des esclaves capturées dans les villes conquises, ruisselants encore d’une huile suave; comme celles-là, elles avaient leurs cales chargées de myrrhe, de nard, de benjoin, d’éléomiel, de cinnamome, de tous les aromates, et de santal, de cèdre, de térébinthe, de tous les bois odoriférants accumulés en plusieurs couches. Les indescriptibles couleurs des flammes dont elles apparaissaient pavoisées évoquaient les parfums et les épices. Bleues, vertes, glauques, safranées, violacées, de nuances indistinctes, ces flammes semblaient jaillir d’un incendie intérieur et se colorer de volatilisations inconnues. Ainsi sans doute flamboyèrent, dans les antiques fureurs du saccage, les profonds réservoirs d’essences qui servaient à macérer les épouses des princes syriens. Telle maintenant, sur l’eau parsemée des matières en fusion qui gémissaient le long des carènes, la flotte magnifique et perdue s’avançait vers le bassin, lentement, comme si des rêves ivres eussent été ses pilotes et qu’ils l’eussent conduite se consumer en face du Lion stylite, gigantesque bûcher votif dont l’âme de Venise resterait parfumée et stupéfiée pour l’éternité.”

Romans, Le Feu, 1900

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“Les voix se marient et se fondent en un silence nébuleux : un silence, qui est l'infini de l'espace; et vite, en silence, l'âme aspirée plane au-dessus de régions de cycles des cycles de générations qui furent. Une région où le gris crépuscule descend toujours sans jamais tomber sur de vastes pâturages vert amande, versant sa cendre, éparpillant sa perpétuelle rosée d'étoiles. Elle suit sa mère à pas empruntés, une jument qui guide sa pouliche. Fantômes crépusculaires cependant pétris d'une grâce prophétique, svelte, croupe en amphore, col souple et tendineux, douce tête craintive. Ils s'évanouissent, tristes fantômes : plus rien. Agendath est une terre inculte, la demeure de l'orfraie et du myope upupa. Netaïm la splendide n'est plus. Et sur la route des nuées ils s'en viennent, tonnerre grondant de la rébellion, les fantômes des bêtes. Houhou! Héla! Houhou! Parallaxe piaffe par-derrière et les aiguillonne, les éclairs lancinants de son front sont des scorpions. L'élan et le yak, les taureaux de Bashan et de Babylone, le mammouth et le mastodonte en rangs serrés s'avancent vers la mer affaissée, Lacus Mortis. Troupe zodiacale de mauvais augure et qui crie vengeance! Ils gémissent en foulant les nuages, cornes et capricornes, trompes et défenses, crinières léonines, andouillers géants, mufles et groins, ceux qui rampent, rongent, ruminent, et les pachydermes, multitude mouvante et mugissante, meurtriers du soleil.”

Ulysse, 1922

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“Je vais chanter la guerre et celui qui, exilé prédestiné (tout a commencé par lui), vint, des parages de Troie, en Italie, à Lavinium, sur le rivage. Lui qui, sur terre et sur mer, fut longtemps le jouet des puissances célestes, à cause de la rancune tenace de la cruelle Junon; qui eut tant à souffrir de la guerre, pour fonder à ce prix une ville et installer ses Pénates dans le Latium. D'où la nation latine, Albe et ses Anciens, et les murailles de la noble Rome. Muse, dis-m'en les raisons : quelque divinité offensée? Quelque grief de la reine des dieux, qui aura amené un homme à parcourir un pareil cycle de malheurs, à affronter autant d'épreuves? De pareilles rancunes en des âmes célestes?”

Arma virumque cano, Trojae qui primus ab oris
Italiam fato profugus Lavinjaque venit
Litora, multum ille et terris jactatus et alto
Vi Superum, saevae memorem Junonis ob iram,
Multa quoque et bello passus, dum conderet urbem
Inferretque deos Latio, genus unde Latinum
Albanique patres atque altae moenia Romae.
Musa, mihi causas memora, quo numine laeso,
Quidve dolens regina deum tot volvere casus
Insignem pietate virum, tot adire labores
Impulerit : tantaene animis caelestibus irae ?
la
Prélude et invocation à la Muse aux premiers vers de l'épopée.
L'Énéide

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“- Vous fomentez la haine de classes, dis-je à Ernest. Je trouve que c'est une erreur et un crime de faire appel à tout ce qu'il y a d'étroit et de brutal dans la classe ouvrière. La haine de classes est antisociale, et il me semble antisociale.
- je plaide non coupable, répondit-il. Il n'y a de haine de classe ni dans la lettre ni dans l'esprit d'aucune de mes œuvres.
Oh! m'écriai-je d'un air de reproche.
Je saisi son livre et l'ouvris.
Il buvait son thé, tranquille et souriant, pendant que je le feuilletais.
- Page 132 - je lus à haute voix : "Ainsi la lutte des classes se produit, au stade actuel du développement social, entre la classe qui paie des salaires et les classes qui en reçoivent."
Je le regardai d'un air triomphant.
- Il n'est pas question de haine de classes là-dedans, me dit-il en souriant.
- Mais vous dites "lutte des class"
- Ce n'est pas du tout la même chose. Et, croyez-moi, nous ne fomentons pas la haine. Nous disons que la lutte de classes est une loi du développement social. Nous n'en sommes pas responsables. ce n'est pas nous qui la faisons. Nous nous contentons de l'expliquer, comme Newton expliquant la gravitation. Nous analysons la nature du conflit d'intérêts qui produit la lutte de classes.
- Mais, il ne devrait pas y avoir de conflit d'intérêts, m'écriai-je.
- Je suis tout à fait de votre avis, répondit-il. Et, c'est précisément l'abolition de ce conflit d'intérêts que nous essayons de provoquer, nous autres socialistes. Pardon, laissez-moi vous lire un autre passage - il prit le livre et tourna quelque feuillets. Page 126 : "Le cycle des luttes des classes, qui a commencé avec la dissolution du communisme primitif de la tribu et de la naissance de la propriété individuelle, se terminera avec la suppression de l'appropriation individuelle des moyens d'existence sociale".”

Le Talon de fer, 1908

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“L'hygiène des bains de sang s'impose par cycle.”

Au Purgatoire, 1994

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“Pour Childe Harold, Rome était le plus parfait des terrains de méditation. Le monde ne pouvait contenir de plus belle réserve de thèmes byroniens. Grandeur et décadence, ruine et beauté, des lieux communs sublimes s'élevaient à chaque carrefour… Méditation sur la tombe de Cecilia Metella. Qui était-elle, cette grande dame qui dormait dans une forteresse? Avait-elle été chaste et belle? De celles qui aiment leur seigneur, ou de celles qui aiment le seigneur des autres? Etait-elle morte jeune, un dernier rayon rose sur ses joues enfantines, ou très vieille, avec de longues tresses gris argent? Il avait pour la mort tant de goût sensuel qu'il s'attendrissait sur cette morte inconnue… Rêverie sur le Palatin. Les oiseaux de nuit s'y répondaient parmi les pierres couvertes de lierre qui avaient formé le palais des empereurs… Eternelle morale de toute histoire humaine. La Liberté engendre la Gloire, puis la Gloire la Richesse, la Tyrannie qui ramène les Barbares, et le cycle recommence… Rhétorique? Oui, sans doute. Mais il faut des rhéteurs… Au Colisée, par un soir de clair de lune où les étoiles tremblaient sous les arcs frangés de fleurs sauvages, dans ce cercle magique hanté par les grands morts, contre ceux qui l'avaient fait souffrir, contre « sa Clytemnestre morale », contre les insulteurs de son exil, il évoqua sa déesse favorite, Némésis, et le temps vengeur.”

André Maurois (1885–1967) romancier essayiste et historien de la littérature français

Don Juan ou la vie de Byron, 1952

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“Comme le Christianisme, l'Islam enseigne que Jésus n'a pas eu de père humain, qu'il est « Parole de Dieu », qu'il est né d'une Vierge et que lui et cette Vierge-Mère ont le privilège unique de ne pas avoir été « touchés par le diable » au moment de leur naissance, ce qui indique l'Immaculée Conception; comme il est impossible même au point de vue musulman que tous ces privilèges incomparables n'aient une signification secondaire, qu'ils ne se soient produits qu'« en passant » et sans laisser de traces décisives, les chrétiens se demanderont comment les musulmans peuvent sans contradiction concilier cette sublimité avec la foi en un Prophète subséquent. Pour le comprendre, - tout argument métaphysique mis à part, - il faut tenir compte de ceci: le Monothéisme intégral comporte deux lignées distinctes, israélite l'une et ismaélienne l'autre; or, alors que dans la lignée israélite Abraham se trouve pour ainsi dire renouvelé ou remplacé par Moïse, - la Révélation sinaïtique étant comme un second commencement du Monothéisme, - Abraham reste toujours le Révélateur primordiale et unique pour les fils d'Ismaël. Le miracle sinaïtique appelait le miracle messianique ou christique : c'est le Christ qui, à un certain point de vue, clôt la lignée mosaïque et clôt la Bible, glorieusement et irrévocablement. Mais ce cycle allant de Moïse à Jésus, ou du Sinaï à l'Ascension, n'englobe précisément pas tout le Monothéisme : la lignée ismaélienne, et toujours abrahamique, se situait en dehors de ce cycle et restait en quelque sorte disponible; elle appelait à son tour un achèvement glorieux, de caractère non sinaïtique et christique, mais abrahamique et mohammédien, et en un certain sens « désertique » et « nomade »”

Frithjof Schuon (1907–1998) métaphysicien, théologien et philosophe suisse

Form and Substance in the Religions

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“Les caractères chinois s’étalent verticalement, de haut en bas; ils imitent le mouvement d’une théogonie descendant du ciel sur terre. L’écriture arabe, elle progresse horizontalement, sur le plan du devenir, mais elle va de la droite, champ de l’action, vers la gauche, région du cœur. Elle décrit donc un mouvement allant de l’extérieur vers l’intérieur.
Les lignes successives d’un texte sont comparables à la trame d’un tissu. En fait, le symbolisme de l’écriture s’apparente à celui du tissage et se réfère comme lui à la croix des axes cosmiques. Pour comprendre ce à quoi nous faisons allusion, il faut se représenter le métier à tisser primitif : les fils de la chaîne sont tendus verticalement et la trame les unit horizontalement par le va-et-vient de la navette, mouvement qui rappelle l’écoulement des cycles tels que jours, mois ou années, tandis que l’immobilité de la chaîne correspond à celle de l’axe polaire. Cet axe est en réalité unique mais son image de répète dans tous les fils de la chaîne, de même que l’instant présent, qui reste toujours un, semble se répéter à travers le temps.
Comme dans le tissage, le mouvement horizontal de l’écriture, mouvement qui est en fait ondulé, correspond à la dimension du devenir et du changement, tandis que le vertical représente la dimension de l’Essence ou des essences immuables.”

Titus Burckhardt (1908–1984)

Art Of Islam: Language And Meaning

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“Et, assurément, la réalité est plus sombre encore que n'osait la prévoir le savant [F. Schrader] qui formulait en 1911 ces conclusions, dont les technocrates et les promoteurs de l'époque ont dû sourire. Il ne pouvait imaginer ni les pluies acides, ni la pollution des rivières et des mers par le mercure et les autres déchets de l'industrie chimique et atomique, ou par l'élévation artificielle de la température de l'eau due aux usines riveraines. Il n'avait pas prévu que plus de deux mille espèces animales seraient exterminées avant la fin du siècle; il ne savait encore rien de l'usage des herbicides, ni des sournois dépotoirs atomiques, cachés dans des endroits écartés, quand ce n'est pas aux abords des villes, ou transportés secrètement à prix d'or pour continuer leur cycle millénaire de nuisance dans le sous-sol des continents pauvres. Il n'eût même pas été capable d'imaginer le désastre de nos marées noires, fruit de l'incurie et de l'avidité, car une construction plus solide et plus rationnelle des pétroliers obligerait à en éliminer la plupart. Il ne pouvait pas prévoir non plus la destruction de la stratosphère, la raréfaction de l'oxygène et de l'ozone, la calotte thermique obscurcissant la lumière solaire et élevant artificiellement la température au ras du sol.
On voit du moins qu'il en savait assez pour signaler le chemin pris par nos apprentis sorciers et par nos marchands du Temple, qui de nos jours n'encombrent plus seulement les abords des sanctuaires mais la terre entière. Ce qu'il disait, avec quelques autres (Albert Schweitzer, un peu plus tard, en Afrique, était alerté lui aussi par les trop soudains changements de climat), nous le crions aujourd'hui. (p. 275)”

Marguerite Yourcenar (1903–1987) écrivaine française

Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey