Citations sur impression
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“J'ai toujours eu l'impression de n'avoir pas tant été mis au monde que de m'être réveillé dedans.”

Harry Crews (1935–2012) écrivain américain

Des mules et des hommes, 1978

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“S'il est au monde une misère sans remède, c'est le serrement de cœur qui vient de l'incommunicable. Et s'il surgissait un nouveau sphinx qui proposât à l'homme cette nouvelle énigme : « Quel est le seul fardeau que le courage humain ne saurait supporter? », je répondrais aussitôt : C'est le fardeau de l'incommunicable. A ce moment-là, alors que j'étais assis dans une salle du Prieuré avec ma mère, sachant combien elle était raisonnable, combien patiemment elle écoutait mes explications, combien elle était franche et ouverte à la compassion, je n'en tombai pas moins dans un abîme de détresse par mon incapacité à me faire entendre… Rien de ce qui se présentait à ma rhétorique n'offrait autre chose que le reflet le plus faible, le plus enfantin de mes souffrances passées. Je me sentais juste aussi désemparé, aussi désarmé dans mon impuissance inerte à faire face (ou même simplement à m'efforcer de faire face) à la difficulté qui se dressait devant moi, que la plupart d'entre nous ont eu l'impression de l'être dans ces rêves de notre enfance où nous nous couchions, sans faire un geste de résistance, devant un lion dévastateur. Je sentis que la situation était sans espoir; un mot unique, que j'essayai de former sur mes lèvres, mourut dans un soupir; et j'acquiesçai passivement à l'aveu implicite que toutes les apparences semblaient comporter — à l'aveu qu'en fait je n'avais aucune excuse à offrir.”

Thomas de Quincey (1785–1859) écrivain britannique

Les Confessions d'un mangeur d'opium anglais, 1822

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“L'individu n'est pas la somme de ses impressions générales, il est la somme de ses impressions singulières.”

L'eau et les rêves — Essai sur l'imagination de la matière, Gaston Bachelard, Le Livre de Poche, Biblio Essais, 1993, 1942, 14, V, Introduction : Imagination et matière, 978-2-253-06100-7
L'Eau et les Rêves, 1942

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“Un ordre de police la rejetait à quarante lieues de Paris: instinctivement, opiniâtrement, comme le noble coursier au piquet, qui tend en tous sens son attache, comme la mouche abusée qui se brise sans cesse à tous les points de la vitre en bourdonnant, elle arrivait à cette fatale limite, à Auxerre, à Châlons, à Blois, à Saumur. Sur cette circonférence qu'elle décrit et qu'elle essaye d'entamer, sa marche inégale avec ses amis devient une stratégie savante; c'est comme une partie d'échecs qu'elle joue contre Bonaparte et Fouché représentés par quelque préfet plus ou moins rigoriste. Quand elle peut s'établir à Rouen, la voilà, dans le premier instant, qui triomphe, car elle a gagné quelques lieues sur le rayon géométrique. Mais ces villes de province offraient peu de ressources à un esprit si actif, si jaloux de l'accent et des paroles de la pure Athènes. Le mépris des petitesses et du médiocre en tout genre la prenait à la gorge, la suffoquait; elle vérifiait et commentait à satiété la jolie pièce de Picard […]. Enfin, grâce à la tolérance de Fouché, qui avait pour principe de faire le moins de mal possible quand c'était inutile, il y eut moyen de s'établir à dix-huit lieues de Paris (quelle conquête!), à Acosta, terre de Mme de Castellane; elle surveillait de là l'impression de Corinne. En renvoyant les épreuves du livre, elle devait répéter souvent, comme Ovide : «Va, mon livre, heureux livre, qui iras à la ville sans moi!» — «Oh! le ruisseau de la rue du Bac!» s'écriait-elle quand on lui montrait le miroir du Léman. A Acosta, comme à Coppet, elle disait ainsi; elle tendait plus que jamais les mains vers cette rive si prochaine. L'année 1806 lui sembla trop longue pour que son imagination tint à un pareil supplice, et elle arriva à Paris un soir, n'amenant ou ne prévenant qu'un très-petit nombre d'amis. Elle se promenait chaque soir et une partie de la nuit à la clarté de la lune, n'osant sortir le jour. Mais il lui prit, durant cette aventureuse incursion, une envie violente qui la caractérise, un caprice, par souvenir, de voir une grande dame, ancienne amie de son père Mme de Tessé, celle même qui disait : «Si j'étais reine, j'ordonnerais à Mme de Staël de me parler toujours.» Cette dame pourtant, alors fort âgée, s'effraya à l'idée de recevoir Mme de Staël proscrite, et il résulta de la démarche une série d'indiscrétions qui firent que Fouché fut averti. Il fallut vite partir, et ne plus se risquer désormais à ces promenades au clair de lune, le long des quais, du ruisseau favori et autour de cette place Louis XV si familière à Delphine.”

Charles-Augustin Sainte-Beuve (1804–1869) critique littéraire et écrivain français

Mai 1835
Portraits de Femmes, 1844, Concernant Germaine de Staël

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“Un ordre de police la rejetait à quarante lieues de Paris : instinctivement, opiniâtrement, comme le noble coursier au piquet, qui tend en tous sens son attache, comme la mouche abusée qui se brise sans cesse à tous les points de la vitre en bourdonnant, elle arrivait à cette fatale limite, à Auxerre, à Châlons, à Blois, à Saumur. Sur cette circonférence qu'elle décrit et qu'elle essaye d'entamer, sa marche inégale avec ses amis devient une stratégie savante; c'est comme une partie d'échecs qu'elle joue contre Bonaparte et Fouché représentés par quelque préfet plus ou moins rigoriste. Quand elle peut s'établir à Rouen, la voilà, dans le premier instant, qui triomphe, car elle a gagné quelques lieues sur le rayon géométrique. Mais ces villes de province offraient peu de ressources à un esprit si actif, si jaloux de l'accent et des paroles de la pure Athènes. Le mépris des petitesses et du médiocre en tout genre la prenait à la gorge, la suffoquait; elle vérifiait et commentait à satiété la jolie pièce de Picard […]. Enfin, grâce à la tolérance de Fouché, qui avait pour principe de faire le moins de mal possible quand c'était inutile, il y eut moyen de s'établir à dix-huit lieues de Paris (quelle conquête!), à Acosta, terre de Mme de Castellane; elle surveillait de là l'impression de Corinne. En renvoyant les épreuves du livre, elle devait répéter souvent, comme Ovide : « Va, mon livre, heureux livre, qui iras à la ville sans moi! » — « Oh! le ruisseau de la rue du Bac! » s'écriait-elle quand on lui montrait le miroir du Léman. A Acosta, comme à Coppet, elle disait ainsi; elle tendait plus que jamais les mains vers cette rive si prochaine. L'année 1806 lui sembla trop longue pour que son imagination tint à un pareil supplice, et elle arriva à Paris un soir, n'amenant ou ne prévenant qu'un très-petit nombre d'amis. Elle se promenait chaque soir et une partie de la nuit à la clarté de la lune, n'osant sortir le jour. Mais il lui prit, durant cette aventureuse incursion, une envie violente qui la caractérise, un caprice, par souvenir, de voir une grande dame, ancienne amie de son père Mme de Tessé, celle même qui disait : « Si j'étais reine, j'ordonnerais à Mme de Staël de me parler toujours. » Cette dame pourtant, alors fort âgée, s'effraya à l'idée de recevoir Mme de Staël proscrite, et il résulta de la démarche une série d'indiscrétions qui firent que Fouché fut averti. Il fallut vite partir, et ne plus se risquer désormais à ces promenades au clair de lune, le long des quais, du ruisseau favori et autour de cette place Louis XV si familière à Delphine.”

Germaine de Staël (1766–1817) femme de lettres, romancière et essayiste française

Mai 1835
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“ce qui frappe l'esprit capricieux du poète n'est pas toujours ce qui impressionne la masse des lecteurs.”

Alexandre Dumas (1802–1870) écrivain et dramaturge français, père de l'écrivain et dramaturge homonyme

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“Je suis un demi-dieu, une divinité mineure, un archange… Choisis le terme que tu préfères. Tu peux t’adresser à moi en m’appelant « maître », car tu n’as pas le droit de connaître mon nom. (Il se laissa tomber en position assise.) J’ai choisi cette forme parce qu’elle m’amuse et ne t’effraie pas. Wallie ne fut pas impressionné. — Pourquoi jouer avec moi ? J’aurais pu croire en toi beaucoup plus tôt si tu t’étais présenté sous un aspect plus divin – ou même avec un simple halo… Il avait dépassé les bornes. Les joues de l’enfant se gonflèrent sous le coup de la colère. — Très bien, puisque c’est ton souhait. Voici un petit aperçu. Wallie cria et se couvrit les yeux, mais trop tard. La caverne était déjà brillante, mais elle s’enflamma soudain d’un éclat magnificent aussi aveuglant que celui d’un soleil. L’enfant était demeuré un enfant, mais une infime partie de sa divinité flamboya un bref instant – et ce fut assez pour plonger un simple mortel dans une terreur sans nom. Dans ce fragment de majesté, Wallie vit que l’âge de cet être dépassait l’imagination – il existait bien avant la formation des galaxies et perdurerait bien après la disparition de feux d’artifice aussi éphémères ; son quotient intellectuel se mesurait en trillions et il était capable de connaître chaque pensée de chaque créature dans l’univers ; sa puissance aurait pu détruire une planète aussi facilement qu’on se cure les ongles ; comparés à sa noblesse et à sa pureté, les êtres humains ressemblaient à des bêtes infâmes et inutiles ; rien n’était capable de résister à ses objectifs froids et inébranlables ; sa compassion dépassait l’entendement humain et connaissait la souffrance des mortels ainsi que leurs raisons d’être, mais il ne pouvait pas la supprimer sans supprimer l’essence mortelle à la base de cette douleur. Wallie sentit aussi quelque chose de plus profond et de plus terrible encore, une présence que nul mot ne pouvait décrire, mais qu’un mortel aurait apparentée à l’ennui ou à la résignation. Il y avait des côtés négatifs à l’immortalité : le fardeau de l’omniscience et l’absence de futur limité, plus la moindre surprise, plus de fin même après la fin des temps, à jamais et à jamais… Wallie réalisa qu’il était à plat”

Le Guerrier de la déesse

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“Notre ignorance des fonctions cérébrales est actuellement si totale que nous n'avons même pas pu commencer à élaborer des stratégies de recherche appropriées. Nous nous trouverions devant le cerveau ouvert, des instruments sophistiqués à la main, à peu près comme un ouvrier non scolarisé pourrait se tenir devant le câblage exposé d'un ordinateur : impressionné peut-être, mais sûrement impuissant. Une microanalyse des fonctions cérébrales n'est d'ailleurs pas plus utile pour comprendre quoi que ce soit sur la pensée qu'une analyse correspondante des impulsions qui circulent dans un ordinateur ne le serait pour comprendre quel programme l'ordinateur exécute. De telles analyses se situeraient simplement au mauvais niveau conceptuel. Elles pourraient aider à décider d'expériences cruciales, mais seulement après que ces expériences aient été conçues sur la base de théories de niveau beaucoup plus élevé”

Joseph Weizenbaum (1923–2008) informaticien germano-américain

par exemple, linguistiques

(en) Our ignorance of brain function is currently so very nearly total that we could not even begin to frame appropriate research strategies. We would stand before the open brain, fancy instruments in hand, roughly as an unschooled labourer might stand before the exposed wiring of a computer: awed perhaps, but surely helpless. A microanalysis of brain functions is, moreover, no more useful for understanding anything about thinking than a corresponding analysis of the pulses flowing through a computer would be for understanding what program the computer is running. Such analyses would simply be at the wrong conceptual level. They might help to decide crucial experiments, but only after such experiments had been designed on the basis of much higher-level (for example, linguistic) theories.
Computer Power and Human Reason: From Judgment To Calculation (1976)

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