J. M. Coetzee citations

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“(…) je vois en toi une âme humaine qui échappe à toute classification, une âme qui a eu la grâce de n'être effleurée ni par les doctrines d ni par l'histoire, une âme qui remue les ailes dans ce sarcophage rigide, qui frémit derrière ce masque de clown. Tu es précieux, Michaels, à ta façon : tu es le dernier de ton espèce, un reste d'une époque antérieure, comme le cœlacanthe ou le dernier homme à parler le yaqui. Nous sommes tous tombés par-dessus bord dans le chaudron de l'histoire; toi seul, guidé par ton étoile idiote, attendant ton heure dans un orphelinat (qui aurait pensé à une cachette pareille?), restant à l'écart de la paix comme de la guerre, embusqué à découvert, là où personne n'avait l'idée de regarder, tu es parvenu à vivre à la manière ancienne, dérivant au fil du temps, soumis aux saisons, n'essayant pas plus de changer le cours de l'histoire que ne le fait un grain de sable.”

“(…) dans la mesure où il avait une image de lui-même, c'était celle d'une poussière à la surface d'une terre profondément endormie pour remarquer le grattement des pattes de fourmi, le grincement des dents de papillon, l'effritement des mottes.”

“Je suis issu d'une lignée d'éternels enfants.”

“Regardons en face notre plus grande peur : la crainte d'avoir été, tous tant que nous sommes, appelés dans ce monde depuis un ordre d'existence différent (que nous avons maintenant oublié) par un magicien inconnu de nous, à la façon dont j'ai, selon vous, évoqué votre fille et sa compagne (ce que je n'ai pas fait). Je pose alors cependant cette question : Avons-nous pour autant perdu notre liberté? En êtes-vous, en particulier, moins maîtresse de votre vie? Devenons-nous nécessairement les marionnettes d'une histoire dotée d'une fin que nous ne pouvons voir et vers laquelle on nous traîne comme des criminels condamnés? Nous savons, chacun à notre manière, à quel point l'écriture est une occupation divagante; et il en est sûrement de même pour la magie. Assis à notre table, nous regardons par la fenêtre, et voici que passe un nuage ressemblant à un chameau; à peine avons-nous le temps de nous en apercevoir, que notre fantaisie nous a déjà transportés jusqu'aux sables de l'Afrique, et que notre héros (qui n'est personne sinon nous-même sous un déguisement) croise le cimeterre avec un brigand maure. Un autre nuage, en forme de navire, vogue devant nous; en un clin d'œil, nous voilà abandonné sur une île déserte et plongés dans le désespoir. Avons-nous des raisons de croire que les vies qu'il nous est donné de vivre se déroulent suivant un dessein plus arrêté que ces aventures fantasques?”

“…) un abandon de soi au temps (…”

“Il n'y a peut-être pas de temps, je me trompe peut-être quand je désigne mon atmosphère sous le nom de temps, il n'y a peut-être que de l'espace, et je suis un point lumineux qui s'agite d'un lieu de l'espace à un autre, suivant un trajet erratique, sautant plusieurs années en un éclair, tantôt effrayée dans le coin d'une salle de classe, tantôt vieille femme aux doigts noueux - c'est une autre possibilité, mon esprit y est ouvert, et cela expliquerait en partie l'aspect hypothétique de mes souvenirs.”

“Je défais le lit et je m’allonge sur le matelas nu, supposant qu’un malaise va s’emparer de moi à sentir le fantôme d’un autre homme subsister dans ses odeurs et les débris de sa vie. Mais je ne ressens rien de pareil : la chambre me paraît toujours aussi connue. Le bras sur la figure, je m’aperçois que je glisse dans le sommeil. Il se peut que le monde tel qu’il est ne soit pas une illusion, ni le mauvais rêve d’une nuit. Il se peut que l’éveil qui nous y projette soit inéluctable, que nous ne puissions ni l’oublier ni nous en dispenser. Mais j’ai toujours autant de mal à croire que la fin est proche. Si les barbares faisaient irruption maintenant, je mourrais dans mon lit, j’en suis sûr, aussi stupide et ignorant qu’un bébé. Il serait encore plus approprié qu’on me surprenne en bas, dans le cellier, une cuiller à la main, la bouche pleine de confiture de figues fauchée dans le dernier bocal de l’étagère : on pourrait alors couper et jeter sur le tas de têtes amoncelées sur la place une tête qui porterait encore une expression coupable, peinée, étonnée de cette irruption de l’Histoire dans le temps immobile de l’oasis. A chacun la fin qui lui convient le mieux. Certains se feront prendre dans des abris creusés sous leur cave, serrant leur trésor contre leur sein, fermant les yeux de toutes leurs forces. D’autres mourront sur la route, aux prises avec les premières neiges de l’hiver. De rares individus mourront peut-être en combattant, armés de fourches. Après moi, les barbares se torcheront avec les archives de la ville. Jusqu’à la fin, nous n’aurons rien appris. Il semble y avoir chez nous tous, au fond de nous, quelque chose de l’ordre du granit, qui résiste à l’enseignement. Bien que la panique déferle dans les rues, personne ne croit vraiment que le monde de certitudes tranquilles qui nous a accueillis à notre naissance est sur le point de disparaître. Personne ne peut accepter qu’une armée impériale ait été anéantie par des hommes armés d’arcs, de flèches et de vieux fusils rouillés, qui vivent dans des tentes, ne se lavent jamais et ne savent ni lire ni écrire. Et qui suis-je pour ricaner d’illusions qui aident à vivre? Est-il meilleure façon de passer ces jours ultimes que de rêver d’un sauveur, l’épée brandie, qui disperserait les armées ennemies, nous pardonnerait les erreurs commises par d’autres en notre nom et nous accorderait une seconde chance de bâtir notre paradis terrestre? Couché sur le matelas nu, je m’applique à animer une représentation de moi-même en nageur, nageant infatigablement, à longues brasses égales, dans le fluide du temps – un fluide plus inerte que l’eau, dépourvu de remous, s’insinuant partout, sans couleur, sans odeur, sec comme du papier.”

“(…) n'y a-t-il pas autre chose à faire du désir que de chercher à posséder l'objet désiré, dans un projet nécessairement vain, puisque sa réalisation ne peut aboutir qu'à l'annihilation de ce que l'on désire? (…) « Sais-tu comment je me sens, Anna? Comme un grand vide, un vide rempli d'une grande absence, une absence qui est un désir d'être remplie, d'être nourrie. Mais en même temps je sais que rien ne m'emplira, parce que la première condition de la vie est de toujours désirer, sans quoi la vie s'arrêterait. C'est un principe vital que d'être toujours insatisfait. La satisfaction ne satisfait pas. Seules les pierres ne désirent rien. Et qui sait? peut-être y a-t-il dans les pierres des trous que nous n'avons jamais découverts. »”

“Nous devrions nous secouer un peu plus souvent. Nous devrions aussi rassembler nos forces et regarder dans le miroir, même si ce que nous y voyons ne nous plaît pas. Je ne parle pas des ravages du temps. Je parle de la créature prise au piège derrière la glace dont nous avons bien soin d'éviter le regard. Regarde donc cet être qui se met à table avec moi, qui passe ses nuits avec moi, qui dit "Je" à ma place. Si vous le trouvez labile, Marijana, ce n'est pas seulement parce que j'ai pris un sale coup. C'est parce que de temps en temps cet étranger, qui dit "Je", brise la glace et parle en moi. À travers moi. Parle ce soir. Parle en ce moment. Parle d'amour.”

“…en venant au monde, chaque créature porte en elle le souvenir de la justice.”

“Je suis un de ces êtres heureux qui échappent à toute vocation.”

“La mort est une affaire privée; l'artiste ne devrait pas envahir la mort d'autrui. Cette position n'est guère courageuse dans un monde où braquer la caméra dans la figure des blessés et des mourants est affiare de routine.”

“Il est aussi difficile d'imaginer l'enfant de Peter le Rouge que d'imaginer l'enfant de 'Kafka' lui-même. Les hybrides sont stériles, ou devraient l'être; et aux yeux de Kafka, lui-même et Peter le Rouge étaient tous deux des hybrides, de monstrueuses machines à penser inexplicablement montées sur des corps d'animaux en proie à la souffrance. Le regard fixe que nous rencontrons sur toutes les photos de Kafka qui nous sont parvenues est un regard de pure surprise : de surprise, d'étonnement, d'inquiétude. De tous les hommes, Kafka est le moins à l'aise avec son humanité. Est-ce là, semble-t-il dire, est-ce là l'image de Dieu?”

“262. Assise sur le stoep aux côtés de mon père, je regarde la terre tourner, les oiseaux s’occuper à nouveau de bâtir leurs nids; la brise est fraîche sur mes joues, et peut-être aussi sur les siennes. «Tu te souviens», dis-je, «quand on allait à la mer, autrefois? On remplissait un panier de sandwiches et de fruits, on allait en carriole à la gare et on prenait le train du soir? On dormait dans le train, bercés par la chanson des roues, on s'éveillait à peine, tout somnolents, quand le train s'arrêtait pour prendre de l'eau, on entendait le murmure lointain des cheminots, et on se rendormait; le lendemain, on arrivait à la mer, on allait à la plage, et on retirait nos chaussures pour patauger, tu me tenais par la main et tu me soulevais au-dessus des vagues? Tu te souviens, le bernard-l'hermite qui m'a pincé l'orteil, et j'ai pleuré, pleuré, et tu me faisais des grimaces pour me consoler? (Tu te souviens de la pension où on logeait? Cette nourriture insipide - un soir, tu as repoussé ton assiette et déclaré que tu ne mangerais pas d'immondices, tu t'es levé et tu as quitté la salle à manger, et j'ai repoussé mon assiette et je t'ai suivi. Et tu te rappelles comme les chiens étaient contents de nous revoir? Une fois, le vieux Jakob avait oublié de les nourrir, et tu as juré épouvantablement et tu lui as supprimé sa ration de viande pour une semaine.. Tu te rappelles Jakob, et Hendrik, et Ou-Anna et Klein-Anna? Tu te rappelles ce fils de Ou-Anna qui avait été tué dans un accident et qu'on avait ramené à la ferme pour l'enterrer, et Ou-Anna qui voulait se jeter dans la fosse?»”

““Quant au fait que les animaux seraient trop bêtes et trop stupides pour se faire entendre eux-mêmes, considérez l'enchaînement d'événements suivant. Quand 'Albert Camus' était jeune garçon en Algérie, sa grand-mère lui demanda de lui amener l'une des poules du poulailler. Il obéit, puis il la regarda couper la tête de la volaille avec un couteau de cuisine, recueillant son sang dans un bol pour ne pas souiller le sol.”

“Marijana prend tous ses pantalons et les emporte chez elle. Elle les rapporte deux jours plus tard. Elle a soigneusement replié les jambes droites qu'elle a cousues. « Je n'ai pas coupé, dit-elle. Vous changez peut-être d'avis et vous portez, vous savez, prothèse. On verra. »

Prothèse : elle prononce ce mot comme si c'était de l'allemand. Thèse, antithèse, puis prothèse.”

“Je lis avec envie dans la FAZ que le nouveau prix Nobel de littérature, Coetzee, ne donne pas d'interview, n'adresse la parole à personne, ne parle pas de littérature, mais seulement de rugby.”

“De cela nous pouvons déduire qu'un dessein dirige après tout nos vies, et qu'en attendant assez longtemps nous devons nécessairement voir ce dessein se révéler; de même qu'en observant un tapissier à l'œuvre nous pouvons ne voir au premier coup d'œil qu'un enchevêtrement de fils; mais, pour peu que nous soyons patients, des fleurs s'offriront peu à peu à nos regards, et aussi des licornes bondissantes et des tourelles.”

“Oh, Vendredi, comment te faire comprendre à quel point, nous qui vivons dans un monde de paroles, nous aspirons à recevoir des réponses à nos questions! C'est comme notre désir, quand nous donnons un baiser à quelqu'un, de sentir les lèvres que nous baisons nous répondre. sans cela, ne nous contenterions-nous pas de dispenser nos baisers aux statues, aux froides statues des rois et des reines, des dieux et des déesses? Pourquoi, à ton avis, ne baisons-nous pas les statues, ne partageons-nous pas notre lit avec des statues, les hommes avec des statues de femmes et les femmes avec des statues d'hommes; des statues sculptées dans les postures du désir? Penses-tu que ces soit seulement parce que le marbre est froid? reste assez longtemps au lit avec une statue, tous deux recouverts de chaudes couvertures, et le marbre se réchauffera. Non, ce n'est pas parce que la statue est froide mais parce qu'elle est morte, ou plutôt parce qu'elle n'a jamais vécu et ne vivra jamais.”

“Vous me demandez si j'ai changé ma défense. Mais qui suis-je, qui est ce je, qui est ce vous? Nous changeons d'un jour à l'autre, et nous restons aussi les mêmes. Aucun je, aucun vous n'est plus fondamental que n'importe quel autre. Vous pourriez aussi bien me demander quelles est la véritable Elizabeth Costello : celle qui a fait la première déclaration, ou celle qui a fait la seconde. Ma réponse est que l'une et l'autre sont vraies. L'une et l'autre. Et ni l'une ni l'autre. 'Je suis une autre'. Pardonnez-moi d'avoir recours à des mots qui ne sont pas de moi, mais je ne peux pas le dire mieux. Vous n'avez pas devant vous la bonne personne. Si vous pensez que vous avez la bonne, vous faites erreur sur la personne. Vous n'avez pas la bonne Elizabeth Costello:.”

“Hier au soir il se croyait à l'article de la mort. Une pincée de ci, une pincée de ça, un chouïa d'autre chose, bien mélangés, mis sous forme de cachet dans une usine de Bangkok, et le monstre de la douleur n'est plus qu'une petite souris. Miraculeux.”

“Quel oiseau a le cœur à chanter, dans un buisson d’épines?”

“…les autres volent vers moi comme des feuilles, mais je les balaie.”

“Ce n'est pas la parole qui fait de l'homme un homme, mais la parole des autres.”

“Je suis comme une femme dont les enfants ont quitté la maison, pensa-t-il; il ne reste plus qu'à mettre de l'ordre et à écouter le silence.”

“Ce qu'il écrirait, s'il pouvait, s'il n'y avait pas M. Whelan pour le lire, serait quelque chose de plus sombre, quelque chose qui, une fois que cela commencerait à couler de sa plume, se répandrait sur la page sans qu'on puisse l'arrêter, comme de l'encre renversée. Comme de l'encre renversée, comme des ombres qui courent à la surface d'une eau qui dort, comme des éclairs qui crépitent et qui zèbrent le ciel.”

“Cependant l'école était passionnante : chaque jour, semblait-il, apportait de nouvelles révélations sur la cruauté, la souffrance et la haine qui font rage sous la surface ordinaire des choses.”

“Je vous demande de vous en souvenir : ce n'est pas parce qu'un homme porte la marque du naufrage qu'au fond de son cœur il est un naufragé.”

“Est-ce que c'est cela l'amour, cette générosité sans contrainte, ce sentiment d'être enfin compris, de ne pas avoir à faire semblant?”

“At the Everyman Cinema there is a season of Satyajit Ray. He watches the Apu trilogy on successive nights in a state of rapt absorption. In Apu's bitter, trapped mother, his engaging, feckless father he recognizes, with a pang of guilt, his own parents. But it is the music above all that grips him, dizzyingly complex interplays between drums and stringed instruments, long arias on the flute whose scale or mode — he does not know enough about music theory to be sure which — catches at his heart, sending him into a mood of sensual melancholy that last long after the film has ended.”

“Talking to Petrus is like punching a bag of sand.
'Are you giving him up?'
'Yes, I am giving him up.”

“Sometimes when he is among the sheep — when they have been rounded up to be dipped, and are penned tight and cannot get away — he wants to whisper to them, warn them of what lies in store. But then in their yellow eyes he catches a glimpse of something that silences him: a resignation, a foreknowledge not only of what happens to sheep at the hands of Ros behind the shed, but of what awaits them at the end of their long, thirsty ride to Cape Town on the transport lorry. They know it all, down to the finest detail, and yet they submit. They have calculated the price and are prepared to pay it — the price of being on earth, the price of being alive.”

“Someone should put together a ballet under the title Guantanamo, Guantanamo! A corps of prisoners, their ankles shackled together, thick felt mittens on their hands, muffs over their ears, black hoods over their heads, do the dances of the persecuted and the desperate. Around them, guards in olive green uniforms prance with demonic energy and glee, cattle prods and billy-clubs at the ready. They touch the prisoners with the prods and the prisoners leap; they wrestle prisoners to the ground and shove the clubs up their anuses and the prisoners go into spasms. In a corner, a man on stilts in a Donald Rumsfeld mask alternately writes at his lectern and dances ecstatic little jigs.
One day it will be done, though not by me. It may even be a hit in London and Berlin and New York. It will have absolutely no effect on the people it targets, who could not care less what ballet audiences think of them.”

“If you have reservations about the system and want to change it, the democratic argument goes, do so within the system: put yourself forward as a candidate for political office, subject yourself to the scrutiny and the vote of fellow citizens. Democracy does not allow for politics outside the democratic system. In this sense, democracy is totalitarian.”

“A dictum [Beckett] quotes from his favourite philosopher, the second-generation Cartesian Arnold Geulincx (1624-1669) suggests his overall stance toward the political: ubi nihil vales, ibi nihil velis, which may be glossed: Don’t invest hope or longing in an arena where you have no power.”

“Paul here is unhappy because unhappiness is second nature to him but more particularly because he has not the faintest idea of how to bring about his heart's desire. And I am unhappy because nothing is happening. Four people in four corners, moping, like tramps in Beckett, and myself in the middle, wasting time, being wasted by time.”

“What he dreads is that, during a lull in the conversation, someone will come up with what he calls The Question—“What led you, Mrs. Costello, to become a vegetarian?”—and that she will then get on her high horse and produce what he and Norma call The Plutarch Response. … The response in question comes from Plutarch's moral essays. His mother has it by heart; he can reproduce it only imperfectly. “You ask me why I refuse to eat flesh. I, for my part, am astonished that you can put in your mouth the corpse of a dead animal, am astonished that you do not find it nasty to chew hacked flesh and swallow the juices of death-wounds.” Plutarch is a real conversation-stopper: it is the word juices that does it. Producing Plutarch is like throwing down a gauntlet; after that, there is no knowing what will happen.”

“The people who lived in the countryside around Treblinka—Poles, for the most part—said that they did not know what was going on in the camp; said that, while in a general way they might have guessed what was going on, they did not know for sure; said that, while in a sense they might have known, in another sense they did not know, could not afford to know, for their own sake.”

“It was from the Chicago stockyards that the Nazis learned how to process bodies.”

“Hitherto he has found in Western music, in Bach above all, everything he needs. Now he encounters something that is not in Bach, though there are intimations of it: a joyous yielding of the reasoning, comprehending mind to the dance of the fingers. He hunts through record shops, and in one of them finds an LP of a sitar player named Ustad Vilayat Khan, with his brother — a younger brother, to judge from the picture — on a veena, and an unnamed tabla player. He does not have a gramophone of this own, but he is able to listen to the first ten minutes in the shop. It is all there: the hovering exploration of tone-sequences, the quivering emotion, the ecstatic rushes. He cannot believe his good fortune. A new continent and all for a mere nine shillings! He takes the record back to his room, packs it away between sleeves of cardboard till the day he will able to listen to it again.”

“But truth is not spoken in anger. Truth is spoken, if it ever comes to be spoken, in love.”

“The boy is special, Aunt Annie told his mother, and his mother in turn told him. But what kind of special? No one ever says.”

“It is not, then, in the content or substance of folly that its difference from truth lies, but in where it comes from. It comes not from ‘the wise man’s mouth’ but from the mouth of the subject assumed not to know and speak the truth.”

“Light in tone, the novel [Murphy] is Beckett’s response to the therapeutic orthodoxy that the patient should learn to engage with the larger world on the world’s terms.”

“Do any of us believe in what we are doing here? I doubt it. Her NCO husband least of all. We are given an old racetrack and a quantity of barbed wire and told to effect a change in men's souls. Not being experts on the soul but assuming cautiously that it has some connection with the body, we set our captives to doing pushups and marching back and forth.”

“The activity of writing, then, is not to be distinguished from the activity of self-exploration. It consists in contemplating the sea of internal images, discerning connections, and setting these out in grammatical sentences (“I could never conceive of a network of meaning too complex to be expressed in a series of grammatical sentences,” says Murnane, whose views on grammar are firm, even pedantic.)”

“Can desire grow out of admiration, or are the two quite distinct species? What would it be like to lie side by side, naked, breast to breast, with a woman one principally admires?”

““It's been such a short visit, I haven't had time to make sense of why you have become so intense about the animal business.”
She watches the wipers wagging back and forth. “A better explanation,” she says, “is that I have not told you why, or dare not tell you. When I think of the words, they seem so outrageous that they are best spoken into a pillow or into a hole in the ground, like King Midas.”
“What is it you can't say?”
“It's that I no longer know where I am. I seem to move around perfectly easily among people, to have perfectly normal relations with them. Is it possible, I ask myself, that all of them are participants in a crime of stupefying proportions? Am I fantasizing it all? I must be mad! Yet every day I see the evidences. The very people I suspect produce the evidence, exhibit it, offer it to me. Corpses. Fragments of corpses that they have bought for money. It is as if I were to visit friends, and to make some polite remark about the lamp in their living room, and they were to say, ‘Yes, it's nice, isn't it? Polish-Jewish skin it's made of, we find that's best, the skins of young Polish-Jewish virgins.’ And then I go to the bathroom and the soap-wrapper says, ‘Treblinka— 100% human stearate.’ Am I dreaming, I say to myself?””

“I return one last time to the places of death all around us, the places of slaughter to which, in a huge communal effort, we close our hearts. Each day a fresh holocaust, yet, as far as I can see, our moral being is untouched.”

“Erasmus dramatizes a well-established political position: that of the fool who claims license to criticize all and sundry without reprisal, since his madness defines him as not fully a person and therefore not a political being with political desires and ambitions. The Praise of Folly, therefore sketches the possibility of a position for the critic of the scene of political rivalry, a position not simply impartial between the rivals but also, by self-definition, off the stage of rivalry altogether.”

“[Being peppered with invitations to travel far and wide to give lectures] has always seemed to me one of the stranger aspects of literary fame: you prove your competence as a writer and an inventor of stories, and then people clamour for you to make speeches and tell them what you think about the world.”

“To any thinking person, it must be obvious that there is something badly wrong in relations between human beings and the animals that human beings rely on for food; and that in the past 100 or 150 years whatever is wrong has become wrong on a huge scale, as traditional animal husbandry has been turned into an industry using industrial methods of production. … It would be a mistake to idealise traditional animal husbandry as the standard by which the animal-products industry falls short: traditional animal husbandry is brutal enough, just on a smaller scale. A better standard by which to judge both practices would be the simple standard of humanity: is this truly the best that human beings are capable of?”

“As for September 11, let us not too easily grant the Americans possession of that date on the calendar. Like May 1 or July 14 or December 25, September 11 may seem full of significance to some people, while to other people it is just another day.”

“In its conception the literature prize belongs to days when a writer could still be thought of as, by virtue of his or her occupation, a sage, someone with no institutional affiliations who could offer an authoritative word on our times as well as on our moral life. (It has always struck me as strange, by the way, that Alfred Nobel did not institute a philosophy prize, or for that matter that he instituted a physics prize but not a mathematics prize, to say nothing of a music prize - music is, after all, more universal than literature, which is bound to a particular language.) The idea of writer as sage is pretty much dead today. I would certainly feel very uncomfortable in the role.”

“Coming to the farm from Worcester, where Coloured people seem to have to beg for whatever they get, he is relieved at how correct and formal relations are between his uncle and the volk. Each morning, his uncle confers with his two men about the day's tasks. He does not give them orders. Instead he proposes the tasks that need to be done, as if dealing cards on a table; his men deal their own cards too. In between, there are pauses, long, reflective silences in which nothing happens.”

“He is like a stone, a pebble that, having lain around quietly minding its own business since the dawn of time, is now suddenly picked up and tossed randomly from hand to hand. A hard little stone, barely aware of its surroundings, enveloped in itself and its interior life. He passes through these institutions and camps and hospitals and God knows what else like a stone. Through the intestines of war. An unbearing, unborn creature.”

“Why does love, even such love as he claims to practise, need the spectacle of beauty to bring it to life? What, in the abstract, do shapely legs have to do with love, or for that matter with desire? Or is that just the nature of nature, about which one does not ask questions?”

“The secret and sacred word that binds him to the farm is 'belong'. Out in the veld by himself he can breathe the word aloud: I belong on the farm. What he really believes but does not utter, what he keeps to himself for fear that the spell will end, is a different form of the word: I belong to the farm. He tells no one because the word is misunderstood so easily, turned so easily to its inverse: The farm belongs to me. The farm will never belong to him, he will never be more than a visitor: he accepts that.”