“Maintenant mes armes sont des filets et la nasse aux mille détours, tressée de souples tiges d'osier qui laisse entrer l'eau et referme son piège sur les poissons. Métamorphosé depuis peu en pêcheur, j'ai en guise d'épée les hameçons recourbés auxquels s'accrochent les appats trompeurs, les souples épieux et le petit trident que je sais déjà enfoncer dans le dos des poissons avant de les assomer à coups de pierre.” Pétrarque (1304–1374) poète humaniste italien À Giovanni Colonna, Epistolæ metricæ, III, 4, Vaucluse, 1347 poisson , eau
“L'adiaphane au midi de la vie est une plaie d'Égypte qui dans les nuits prénatale et postmortelle est leur très véritable ubi et quomodo. Et de même que les fins et aboutissants de toutes choses s'accordent en quelque manière et mesure avec leur commencement et origine, cette même concordance multiple qui fait partir de la naissance l'accroissement successif, accomplit par une métamorphose régressive cette diminuation et ablation tendant au terme final selon le désir de la nature; ainsi en est-il de notre être sublunaire. Les trois sœurs nous poussent dans la vie; nous gémissons, grossissons, jouons, embrassons, étreignons, lâchons, rabougrissons, mourons; sur nous, morts, elles se penchent. D'abord sauvé des eaux du père Nil, parmi les roseaux, une corbeille d'osier dascié; pour finir, un creux dans la montagne, un sépulcre secret parmi les clameurs du chat-pard et de l'orfraie. Et de même qu'aucun homme ne sait l'ubicité de son tumulus ni dans quelle suite de transformations nous serons par là introduits, que ce soit à Tophet ou à Endenville, en semblable manière, tout nous est caché lorsque nous voudrions apercevoir derrière nous de quelle région la quiddité de notre égoticité a pris son undéité.” James Joyce livre Ulysse Ulysse, 1922 montagne , chat , naissance , nature
“Le capitaine observe les femmes qui sont dans la cour, mêlées aux militaires et aux civils. Ce sont pour la plupart des parentes de soldats ou de civils armés : mères, épouses et filles, voisines qui sont venues pour accompagner leurs hommes. Sous la direction du caporal artilleur José Montaño, certaines, qui ont apporté des draps, des courtepointes et des nappes, les déchirent et entassent dans la cour une pile de charpie et de bandes en perspective du moment où les hommes commenceront à tomber. D'autres ouvrent des caisses de munitions, mettent des paquets de cartouches dans des cabas et des paniers d'osier, et les portent aux hommes qui prennent position dans les quartiers du parc ou dans la rue.– Autre chose, Arango. Essayer d'évacuer ces femmes avant que les Français n'arrivent… Ce n'est point un endroit pour elles. Le lieutenant pousse un profond soupir.– J'ai déjà essayé, mon capitaine. Elle m'ont ri au nez.” Arturo Pérez-Reverte (1951) écrivain espagnol Un jour de colère, 2008 mère , fille , femmes , hommes
“Le mai le joli mai en barque sur le RhinDes dames regardaient du haut de la montagneVous êtes si jolies mais la barque s'éloigneQui donc a fait pleurer les saules riverainsOr des vergers fleuris se figeaient en arrièreLes pétales tombés des cerisiers de maiSont les ongles de celle que j'ai tant aiméeLes pétales flétris sont comme ses paupièresSur le chemin du bord du fleuve lentementUn ours un singe un chien menés par des tziganesSuivaient une roulotte traînée par un âneTandis que s'éloignait dans les vignes rhénanesSur un fifre lointain un air de régimentLe mai le joli mai a paré les ruinesDe lierre de vigne vierge et de rosiersLe vent du Rhin secoue sur le bord les osiersEt les roseaux jaseurs et les fleurs nues des vignes” Guillaume Apollinaire livre Alcools Alcools