“Il lui prend soudain le doux désir de s'abandonner dans le vent du destin comme une bourrasque qui colle aux reins et emporte.Un peu de repos ! Du repos, et des seuils chauds pour boire le soleil et fumer la pipe.” Jean Giono livre Colline Colline, 1929
“Ma mère renversait la tête vers les nuées, comme si elle eût attendu qu’un vol d’enfants ailés s’abattît. Au bout d’un moment, elle jetait le même cri, puis se lassait d’interroger le ciel, cassait de l’ongle le grelot sec d’un pavot, grattait un rosier emperlé de pucerons verts, cachait dans sa poche les premières noix, hochait le front en songeant aux enfants disparus, et rentrait. Cependant au-dessus d’elle, parmi le feuillage du noyer, brillait le visage triangulaire et penché d’un enfant allongé, comme un matou, sur une grosse branche, et qui se taisait. Une mère moins myope eût-elle deviné, dans les révérences précipitées qu’échangeaient les cimes jumelles des deux sapins, une impulsion étrangère à celle des brusques bourrasques d’octobre… Et dans la lucarne carrée, au-dessous de la poulie à fourrage, n’eût-elle pas aperçu, en clignant les yeux, ces deux taches pâles dans le foin: le visage d’un jeune garçon et son livre? Mais elle avait renoncé à nous découvrir, et désespéré de nous atteindre.” Colette livre La Maison de Claudine Romans, La Maison de Claudine, 1922 mère , vol , cri , enfants
“Or si jamais un rêve avait été impraticable et insensé, c’était celui-ci : sauver la machine échouée sur les Douvres. Envoyer travailler sur ces roches un navire et un équipage serait absurde; il n’y fallait pas songer. C’était la saison des coups de mer; à la première bourrasque les chaînes des ancres seraient sciées par les crêtes sous-marines des brisants, et le navire se fracasserait à l’écueil. Ce serait envoyer un deuxième naufrage au secours du premier. Dans l’espèce de trou du plateau supérieur où s’était abrité le naufragé légendaire mort de faim, il y avait à peine place pour un homme. Il faudrait donc que, pour sauver cette machine, un homme allât aux rochers Douvres, et qu’il y allât seul, seul dans cette mer, seul dans ce désert, seul à cinq lieues de la côte, seul dans cette épouvante, seul des semaines entières, seul devant le prévu et l’imprévu, sans ravitaillement dans les angoisses du dénûment, sans secours dans les incidents de la détresse, sans autre trace humaine que celle de l’ancien naufragé expiré de misère là, sans autre compagnon que ce mort. Et comment s’y prendrait-il d’ailleurs pour sauver cette machine? Il faudrait qu’il fût non seulement matelot, mais forgeron. Et à travers quelles épreuves! L’homme qui tenterait cela serait plus qu’un héros. Ce serait un fou.” Victor Hugo livre Les Travailleurs de la mer Roman, Les Travailleurs de la mer, 1866 misère , mer , mort , hommes
“je finirai bien par te rencontrer quelque partbon dieu!et contre tout ce qui me rend absent et douloureuxpar le mince regard qui me reste au fond du froidj'affirme ô mon amour que tu existesje corrige notre vienous n'irons plus mourir de langueurà des milles de distance dans nos rêves bourrasquesdes filets de sang dans la soif craquelée de nos lèvresles épaules baignées de vols de mouettesnonj'irai te chercher nous vivrons sur la terrela détresse n'est pas incurable qui fait de moiune épave de dérision, un ballon d'indécenceun pitre aux larmes d'étincelles et de lésions profondesfrappe l'air et le feu de mes soifscoule-moi dans tes mains de ciel de soiela tête la première pour ne plus revenir” Gaston Miron livre L'Homme rapaillé L'Homme rapaillé
“Sonore immensité des mers de l’Harmonie,Où les rêves, vaisseaux pris d’un vaste frisson,Voguent vers l’inconnu, leur voilure infinieClaquant aven angoisse aux bourrasques du Son!” Stuart Merrill (1863–1915) poète américain francophone rêves , mer