“Il faut rappeler à tous ceux qui dénoncent la « ghettoïsation » des gays et lesbiennes dans les grandes villes (ce qui n'est souvent qu'un mot d'injure euphémisée pour exprimer une réaction phobique à l'égard de leur visibilité collective) que ce « ghetto » visible (et la métaphore du « ghetto » masque ici que ce dont il est question est tout le contraire d'un ghetto!) est d'abord et avant tout une manière d'échapper au « ghetto » invisible, au « ghettto » mental, c'est-à-dire la mise au secret d'une bonne partie de leur existence et de leur personnalité à laquelle sont contraints de nombreux individus qui ne peuvent ou n'osent pas vivre leur homosexualité autrement que derrière l'écran de la dissimulation et du secret. La visibilité est alors le moyen d'échapper à ce terrible « ghetto » intérieur de l'âme assujettie par la honte de soi. (p. 156)”

Insult and the Making of the Gay Self

Dernière mise à jour 22 mai 2020. L'histoire

Citations similaires

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“Un antisémite est quelqu'un qui reproche aux Juifs d'habiter mentalement dans un ghetto, tout en se proposant de les empêcher physiquement d'en sortir.”

Livres, Comment peut-on être païen ?, 1981, Dernière Année. Notes pour conclure le siècle http://books.google.fr/books?id=LI5vx9Mdgb4C&printsec=frontcover&source=gbs_navlinks_s#v=onepage&q=&f=false, 2001

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“Le langage quotidien (tout comme le langage des images) est de part en part traversé par des rapports de force, par des rapports sociaux (de classe, de sexe, d'âge, de race, etc.), et c'est dans et par le langage (et l'image) que se joue la domination symbolique, c'est-à-dire la définition - et l'imposition - des perceptions du monde et des représentations socialement légitimes. Le dominant, comme le dit Pierre Bourdieu, est celui qui réussit à imposer la manière dont il veut être perçu, et le dominé, celui qui est défini, pensé et parlé par le langage de l'autre et/ou celui qui ne parvient pas à imposer la perception qu'il à de lui-même. Seules les périodes de crise sociale, culturelle, ou au moins l'irruption de mobilisations politiques ou culturelles, peuvent permettre une mise en question de cet ordre symbolique des représentations et du langage dont al force principale est de se présenter comme ressortissant aux évidences d'un ordre naturel, immuable, et sur lequel on ne s'interroge pas ou sur lequel on s'interroge faussement pour mieux le réaffirmer dans son arbitraire en le présentant comme ayant toujours existé.
La mobilisation politique, l'action politique, sont toujours des batailles pour la représentation, pour le langage et les mots. Ce sont des luttes autour de la perception du monde. La question qui s'y joue est de savoir qui définit la perception et la définition d'un groupe et la perception et la définition du monde en général. La mobilisation, l'action politique, consistent souvent, pour un groupe, à essayer de faire valoir, d'imposer la manière dont il se perçoit lui-même, et d'échapper ainsi à la violence symbolique exercée par la représentation dominante. Mais il convient de préciser qu'il n'y a pas, pour les gays, encore moins pour les « gays et lesbiennes », une manière d'être et de se penser soi-même qui préexisterait et qu'il conviendrait de découvrir et de manifester au grand jour, et encore moins une seule et unique manière d'être et de « se percevoir », ce qui constitue toute la complexité du mouvement gay et lesbien et explique le fait, si souvent souligné, que les définitions qu'il peut donner de lui-même ne sont que des constructions provisoires, fragiles et nécessairement contradictoires entre elles. (p. 117-118)”

Didier Eribon (1953) philosophe et sociologue français

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