“Giclèrent sur l’écran les traces orange des bombes sur le ciel noir. Désormais, la Guerre se déployait sur toutes les chaînes, avec ce « r » présent dans toutes les langues : « Krieg, Guerra » ou englouti par les mâchoires américaines : « War ». Les Arabes la nomment « har’b » avec un « h » soufflé de gorge, ce « r » guttural du fond du ventre.Dans toutes les bouches, cette râpe du « r .»” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Au fond de la prairie, les branches noires du chêne se détachaient précises, bien trop précises sur la brume grise de février. Le vieil arbre gravait une griffe immobile contre la brume mouvante. Cinq branches noires à droite, cinq à gauche.Deuil symétrique.Parfait.” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Arrêter les images n’aurait jamais arrêté la Guerre. Car tout était Guerre… tout était Guerre et Printemps à la fois” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Cette Guerre, je la voyais partout. Dans les centres commerciaux, des mères poussaient de grosses poussettes lourdes comme des chars.” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Sur le Golfe, il devait encore faire nuit. La mer, le ciel devaient se fondre unis – noir à peine frangé du blanc des vagues. Noir immense. Noir engloutissant tous les espoirs.” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Sous les hululements, j’avais plié la nuque. Sous la douche, le savon me parut à la fois immense et dérisoire. Sur la céramique, mes pieds dessinaient deux éventails japonais. Au travers de mes larmes, au travers de la buée, je vis brûler les branches noires du chêne” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Alors, c’est Paul que je regarde. Voir, je ne sais faire que cela : Paul, neuf mois. Son premier Printemps. Des yeux, je suis l'arc énorme de sa joue rose que surmonte celui plus petit de la cornée, puis au-dessus, un cil noir incurvé en aile d'oiseau. Et ses joues … si tendues qu'elles en allument des reflets. Entre la mer et le ciel, les soldats avancent lentement, leurs costumes gris volent sur le sable comme des poissons perdus.” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Lorsque Paul manifeste sa volonté de changer d’endroit, une pointe de vert apparaît dans le bleu de ses yeux. Sans cris, sans pleurs, sans phrases, je sais deviner son désir aux variations de couleur de son iris. Et je le change aussitôt de place. Oui, j’accours à un anneau bleu repoussé par la dilatation d’une pupille, à un iris verdi par la colère. Je me précipite sans mots formés avant le geste.” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Les cheveux sombres cachaient presque son visage clair. La souffrance ou la peur dilatait ses yeux noirs contre sa peau blanche. Elle criait parce qu'elle avait été réveillée en sursaut par la caméra ou parce qu'elle souffrait de sa jambe amputée…” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Noir immense. Noir engloutissant tous les espoirs.” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004
“Aux extrémités des branches, luisaient des bourgeons à carapaces vertes comme les chars.” Anne Calife Paul et le chat Paul et le chat, 2004