Citations du livre
Comprendre l'Islam


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“La dialectique métaphysique ou ésotérique évolue entre la simplicité symboliste et la complexité réflexive; cette dernière - et c'est à un point que les modernes ont de la peine à comprendre - peut devenir de plus en plus subtile sans pour cela s'approcher d'un pouce de la vérité; autrement dit, une pensée peut se subdiviser en mille ramifications et s'entourer de toutes les précautions possibles tout en restant extérieure et ""profane"", car aucune virtuosité du potier ne transformera l'argile en or. On peut concevoir un langage cent fois plus réflexif que celui dont on use actuellement, puisqu'il n'y a là pas de limites de principe; toute formulation est forcément ""naïve"" à sa manière, et on peut toujours chercher à la hausser par un luxe de miroitements logiques ou imaginatifs; or cela prouve, d'une part que la réflexivité comme telle n'ajoute aucune qualité essentielle à une énonciation, et d'autre part, rétrospectivement, que les énonciations relativement simples des sages d'autrefois étaient chargées d'une plénitude que, précisément, on ne sait plus discerner a priori et dont on nie volontiers l'existence.

Ce n'est pas une réflexivité poussée à l'absurde qui peut nous introduire au cœur de la gnose; ceux qui entendent procéder sur ce plan par investigations et tâtonnements, qui scrutent et qui pèsent, n'ont pas saisi qu'on ne peut soumettre tous les ordres de connaissance au même ""régime"" de logique et d'expérience, et qu'il est des réalités qui se comprennent d'un coup d’œil et qui ne se comprennent pas du tout.”

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“L’état humain — ou tout autre état « central » analogue — est comme entouré d’un cercle de feu : il n’y a là qu’un choix, ou bien échapper au « courant des formes » par le haut, en direction de Dieu, ou bien sortir de l’humanité par le bas, à travers le feu, lequel est comme la sanction de la trahison de ceux qui n’ont pas réalisé le sens divin de la condition humaine; si « la condition humaine est difficile à atteindre», comme l’estiment les Asiates « transmigrationnistes », elle est également difficile à quitter, pour la même raison de position centrale et de majesté théomorphe. Les hommes vont au feu parce qu’ils sont des dieux, et ils en sortent parce qu’ils ne sont que des créatures; Dieu seul pourrait aller éternellement en enfer s’il pouvait pécher. Ou encore : l’état humain est tout près du Soleil divin, s’il est possible de parler ici de « proximité »; le feu est la rançon éventuelle — à rebours — de cette situation privilégiée; on peut mesurer celle-ci à l’intensité et à l’inextin-guibilité du feu. Il faut conclure de la gravité de l’enfer à la grandeur de l’homme, et non pas, inversement, de l’apparente innocence de l’homme à l’injustice supposée de l’enfer.

[…] Bien des hommes de notre temps tiennent en somme le langage suivant : « Dieu existe ou il n ’existe pas; s’il existe et s’il est ce qu’on dit, il reconnaîtra que nous sommes bons et que nous ne méritons aucun châtiment »; c’est-a-dire qu’ils veulent bien croire à son existence s’il est conforme à ce qu’ils s’imaginent et s’il reconnaît la valeur qu’ils s’attribuent à eux-mêmes. C’est oublier, d’une part, que nous ne pouvons connaître les mesures avec lesquelles l’Absolu nous juge, et d’autre part, que le « feu » d’outre-tombe n’est rien d ’autre, en définitive, que notre propre intellect qui s’actualise à l'encontre de notre fausseté, ou en d’autres termes, qu’il est la vérité immanente qui éclate au grand jour. A la mort, l’homme est confronté avec l’espace inouï d’une réalité, non plus fragmentaire, mais totale, puis avec la norme de ce qu’il a prétendu être, puisque cette norme fait partie du Réel; l’homme se condamne donc lui-même, ce sont — d’après le Koran — ses membres mêmes qui l’accusent; ses violations, une fois le mensonge dépassé, le transforment en flammes; la nature déséquilibrée et faussée, avec toute sa vaine assurance, est une tunique de Nessus. L’homme ne brûle pas que pour ses péchés; il brûle pour sa majesté d’image de Dieu. C’est le parti pris d’ériger la déchéance en norme et l’ignorance en gage d’impunité que le Koran stigmatise avec véhémence — on pourrait presque dire : par anticipation — en confrontant l’assurance de ses contradicteur avec les affres de la fin du monde (1).
En résumé, tout le problème de la culpabilité se réduit au rapport de la cause à l’effet. Que l’homme soit loin d'être bon, l’histoire ancienne et récente le prouve surabondamment, l’homme n’a pas l’innocence de l’animal, il a conscience de son imperfection, puisqu’il en possède la notion; donc il est responsable. Ce qu’on appelle en terminologie morale la faute de l’homme et le châtiment de Dieu, n’est rien d ’autre, en soi, que le heurt du déséquilibre humain avec l’Equilibre immanent; cette notion est capitale. […]

(1) C'est la même un des thèmes les plus instamment répétés de ce livre sacré, qui marque parfois son caractère d'ultime message par une éloquence presque désespérée.”

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“(…) Celui qui ignore que la maison brûle, n'a aucune raison d'appeler au secours; de même, l'homme qui ne sait pas qu'il est en train de se noyer ne saisira pas la corde salvatrice; mais savoir que nous périssons, c'est soit désespérer, soit prier. Savoir réellement que nous ne sommes rien, parce que le monde entier n'est rien, c'est se souvenir de « Ce qui est », et se libérer par ce souvenir.
Quand un homme est victime d'un cauchemar et qu'il se met alors, en plein rêve, à appeler Dieu au secours, il se réveille infailliblement, et cela démontre deux choses : premièrement, que l'intelligence consciente de l'Absolu subsiste dans le sommeil comme une personnalité distincte, - notre esprit reste donc en dehors de nos états d'illusion, et deuxièmement, que l'homme, quand il appelle Dieu, finira par se réveiller aussi de ce grand rêve qu'est la vie, le monde, l'ego. S'il est un appel qui peut briser le mur du rêve, pourquoi ne briserait-il pas aussi le mur de ce rêve plus vaste et plus tenace qu'est l'existence? Il n'y a, dans cet appel, aucun égoïsme, du moment que l'oraison pure est la forme la plus intime et la plus précieuse du don de soi.(2)
(2) « L'Heure suprême ne viendra qu'alors qu'il n'y aura plus personne sur terre qui dise : Allah! Allah! » (hadith). - C'est en effet la sainteté et la sagesse - et avec elles l'oraison universelle et quintessencielle - qui soutiennent le monde.”

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